La douance
Avez-vous vu le documentaire qui traite de la douance Doués et oubliés : maman quand est-ce que j’apprends ? diffusé à Télé-Québec le 3 octobre 2016 ? Si vous l’avez manqué, vous pouvez le visionner à www.telequebec.tv. Vous constaterez qu’il est temps que le Québec se sensibilise à la réalité de nos jeunes doués. Je travaille depuis 8 ans avec des doués, et je constate chaque jour qu’un grand nombre souffre, mais aussi que nous passons à côté d’un immense potentiel.
Pour donner suite au documentaire de Marie-Pier Duval, je vous propose une série de six articles sur la douance. Les deux premiers ont pour objectif de vous aider à comprendre la douance. Dans le troisième, j’aborderai les autres troubles qui y sont souvent associés ainsi que le fonctionnement scolaire des doués. Le quatrième article portera sur les nombreux tabous qui entourent la douance. Le cinquième article vous aidera finalement à dépister les enfants doués et dans le dernier, je vous guiderai concrètement sur ce que vous pouvez faire pour les aider.
La douance, qu’est-ce que c’est ?
Douance, surdouance, haut potentiel ou précocité intellectuelle ?
Premier problème. On manque encore de consensus sur la terminologie. En France, une tendance vers le terme « précocité intellectuelle » semble émerger, mais y on retrouve aussi souvent le terme «surdouance». Au Québec, on tend plutôt vers «douance» et «haut potentiel intellectuel (HP ou HPI)».
Deuxième problème, pour comprendre la douance, il faut d’abord comprendre ce qu’est l’intelligence.
L’intelligence, c’est quoi ?
Excellente question ! Plusieurs chercheurs dans le monde se la posent d’ailleurs depuis des décennies et un débat scientifique est toujours présent. Y a-t-il un seul facteur d’intelligence générale qui, quoique décomposable (verbale, non verbale, etc.), est commun à tous et prédicteur de réussite ? Ou l’intelligence a-t-elle de multiples facettes (linguistique, logico-mathématiques, etc.) qui prédiront la réussite dans un domaine particulier ?
Unique ou multiple, les chercheurs s’entendent généralement sur le fait que l’intelligence c’est :
- Notre capacité à penser, réfléchir et comprendre ;
Et
- Notre capacité à nous adapter, à agir et à créer.
On sait que l’intelligence est biologique, présente dès notre naissance. Elle n’est pas causée par l’éducation ou l’environnement, même si elle entrera bien évidemment en interaction avec la façon dont nous serons élevés ou le milieu dans lequel nous nous épanouirons. En bref, l’intelligence est causée par des milliers de nos gènes. Et nos gènes, ce sont nos parents qui nous les transmettent.
Maintenant, comment fait-on pour savoir si quelqu’un est plus ou moins intelligent que les autres ?
Comment mesure-t-on l’intelligence ?
Même si des débats statistiques et conceptuels existent sur la façon de mesurer l’intelligence, on sait que les tests de quotient intellectuel (QI) mesurent bien ce qu’on entend généralement par «intelligence».
Pour démystifier les mythes entourant l’intelligence et le QI, n’hésitez pas à visiter : www.douance.org.
En bref, sachez qu’une évaluation réalisée par un (neuro)psychologue, qui tient compte du développement global de la personne et qui inclut un test de QI, est une mesure valide de l’intelligence.
Tous les (neuro)psychologues formés pour le faire peuvent évaluer l’intelligence. Maintenant, ils ne sont pas tous spécialisés en douance. Il est conseillé de «magasiner» le lien de confiance et les compétences du professionnel qu’on consulte parce que vous verrez dans le prochain article que la douance peut être complexe à évaluer et masquée par d’autres troubles.
Ceci étant dit, avant de dire ce qu’est la douance, il est utile de comprendre ce qu’elle n’est pas.
Être doué, ce n’est pas ?
La Figure 1 vous montre la répartition, dans la population, des quotients intellectuels obtenus à un test de QI classique. On y lit que 68% des gens sont dans la moyenne. Le rythme d’apprentissage et les objectifs scolaires sont pensés pour eux. À moins de faire face à des difficultés dans leur développement, ils réussiront à l’école et auront un fonctionnement normal à l’âge adulte.
On y voit ensuite que 13,5% des gens ont une intelligence supérieure (au-dessus de la moyenne) et qu’un autre 13,5% ont une intelligence inférieure (au-dessous de la moyenne). La recherche montre que les premiers auront plus de facilité à l’école grâce à leur rythme d’apprentissage plus rapide. En majorité, ce sont les enfants «bons à l’école» qui ont ensuite une vie professionnelle performante. Tandis que les seconds auront difficultés d’apprentissage pour lesquelles ils auront du soutien et un cheminement adapté. Finalement, la majorité obtiendra un emploi et atteindra un bon niveau de vie.
Au total, 95% des gens autour de nous qui parviennent, avec leurs forces et leurs faiblesses, à s’adapter et à fonctionner dans la société à différents niveaux.
Tout cela, ce n’est pas la douance.
Figure 1. Courbe de répartition normale des QI selon Wechsler (Courbe de Gauss)
Tribulations d’un petit zèbre (2012). www.lenigmedupetitzebre.fr
Et le bas de la courbe ?
On voit qu’il y a 2,5% des personnes qui (si elles ont également des limitations dans leur adaptation quotidienne) ont une déficience intellectuelle (DI). Heureusement, la DI est reconnue par le Ministère de la Santé et des Services sociaux ainsi que par le Ministère de l’Éducation. En vertu de la Loi sur les services de santé, les personnes DI bénéficient d’aide financière et technique, de services publics spécialisés en réadaptation ainsi que de classes et d’écoles adaptées. N’hésitez pas à vous sensibiliser sur la déficience intellectuelle, en visitant notamment le www.amdi.info.
Bien entendu, cela non plus, ce n’est pas la douance.
Donc être doué, qu’est-ce que c’est ?
Actuellement, on tend à définir comme ayant un haut potentiel intellectuel, les individus avec un QI supérieur à 130, donc autour de 2,5% de la population. En France, plusieurs auteurs recommandent un seuil de 125, ce qui inclut plutôt 5% de la population.
En résumé, un enfant doué est AUSSI éloigné et différent de la moyenne qu’un enfant avec une DI. Il devient donc logique de croire que les enfants doués apprennent, eux aussi, différemment et que l’école n’est probablement pas adaptée à leurs besoins à tous.
Il va sans dire que cette définition ne vous aide pas à dépister les jeunes doués dans votre classe ou dans votre famille. Heureusement, dans le prochain article, vous verrez que la douance ce n’est pas juste une question de QI !
Voici un autre article qui saura vous plaire :
Pour en savoir plus et mieux vous outiller :
Dre Marianne Bélanger, Psy.D., Ph.D., psychologue, spécialisée en douance.
Cofondatrice Clinique TDAH Montérégie et Clinique Neuropsychologie Rive-Sud Montréal
www.neuropsychologie-montreal.com
www.facebook.com/cliniqueneuropsychologietdahmonteregie