Introduction
Une jeune fille avec une trisomie 21 arrive devant un adulte qu’elle ne connaît pas. Elle ne parle pas. Pourtant la mère insiste qu’elle parle à la maison et qu’elle est juste timide devant les personnes qu’elle ne connaît pas. L’adulte non familier doute de la véracité des paroles de la mère. Sûrement qu’elle est dans le déni. Pourtant, la jeune fille sort de la salle et, dans le couloir, s’exclame et parle à son père qui vient d’arriver.
Un jeune avec un TSA n’a pas l’air de prêter attention à grand-chose. Il tourne en rond dans la pièce puis grimpe sur le canapé et ne donne pas l’impression de vouloir collaborer à quoique ce soit. L’adulte non familier se dit qu’il ne pourra rien faire avec ce jeune qui n’a pas les prérequis pour travailler à table. Pourtant, la mère demande au jeune d’arrêter de faire son clown, de venir s’assoir et de collaborer. Le jeune se met lire et écrire les mots que la mère lui dicte. Qui l’eut cru?
L’effet Pygmalion
En psychologie sociale, il existe ce qu’on appelle l’effet Pygmalion. L’histoire c’est qu’un psychologue a effectué une expérience au sein d’une école où il a fait croire aux enseignants que certains élèves avaient un QI élevé et d’autres avaient un QI plus faible (Rosenthal & Jacobson, 1968). Les enseignants avaient tendance à traiter positivement les élèves qui avaient supposément un QI élevé et moins positivement les élèves qui avaient supposément un QI moins élevé. Le comportement des enseignants envers leurs élèves a eu un effet sur leurs performances : les élèves avec un QI supposément élevé ont eu de meilleurs résultats que les élèves avec un QI supposément moins élevé.
En vérité, à l’origine, les QI des élèves étaient respectivement du même niveau! Il a donc suffi que les enseignants pensent que les élèves étaient capables, qu’ils aient des attentes positives envers leurs capacités, pour qu’en fin de compte ces élèves aient un meilleur rendement. En somme, c’est la prédiction qui se réalise …
L’effet Golem
L’inverse aussi existe, c’est l’effet Golem. Dans cette histoire, les élèves qui avaient supposément un QI moins élevé ont été moins performants aux évaluations. Leurs enseignants pensaient qu’ils étaient moins capables donc ils avaient moins d’attentes envers eux et effectivement ces élèves ont eu de moins bons résultats. De nouveau, la prédiction qui se réalise…
En réalité, si l’on s’en tient à ce qu’on observe du comportement d’un enfant, nous n’obtenons pas toutes les informations nécessaires pour juger de ses capacités.
Les aprioris
Par exemple, typiquement, l’enfant qui respire avec la bouche ouverte et la langue visible, le corps hypotone et qui ne répond pas à nos questions…. On pourrait aisément tomber dans le piège de penser : « pas intelligent, ne comprend pas ».
Aussi, l’enfant qui ne nous regarde pas, qui gigote et qui ne répond pas …. On pourrait aussi tomber dans le piège de : « pas capable de collaborer, n’écoute pas, ne comprend pas ».
À ce moment-là, les objectifs qu’on pourrait proposer seraient bien en-dessous de capacités réelles de ces enfants.
Dans le premier cas, elle souffre d’hypotonie et de dyspraxie verbale….il s’agit peut-être simplement de lui accorder un délai de réponse pour répondre et un temps d’adaptation à l’adulte non familier. C’est ainsi qu’on découvrirait qu’elle est déjà au niveau d’apprendre à lire et écrire.
Dans le deuxième cas, ce n’est pas parce qu’il ne semble pas nous écouter qu’il ne nous entend pas. S’il l’on exige de lui le même comportement que l’on exigerait de n’importe quel jeune de son âge, on serait ravi de constater qu’assis au bureau, en train d’écrire et de lire des phrases, il travaille, en réalité, très bien.
Les parents au premier plan
Une approche intéressante serait donc de commencer en demandant aux personnes qui connaissent le mieux leurs enfants ce dont ils sont capables et leurs attentes par rapport à leurs apprentissages. Ces personnes, ce sont les parents. Ils ne sont pas dans le déni. Ils savent pertinemment bien que leur enfant a des défis. Par contre, ils sont au courant de leurs capacités et ils ont des attentes. Ces parents souhaitent qu’on travaille avec les capacités de leurs enfants pour les amener jusqu’au bout de leurs ressources. C’est tout.
Et, si l’effet pygmalion s’applique, les performances des enfants seront meilleures parce qu’on aura des attentes envers eux (Rosenthal, & Rosnow, 1984). Inversement, si l’effet Golem s’applique, les performances des enfants seront définitivement moins intéressantes.
Conclusion
Donner crédit aux observations parentales est une manière de mieux percevoir ce qui se cache derrière les apparences, autrement dit les comportements observables de leur enfant. Ainsi, nos attentes seront plus proches des capacités réels de leur enfant que l’on rencontre pour la première fois. On ne tombera pas dans le piège des apparences. On débutera le travail plus proche du niveau réel de l’enfant. On sera tout de suite plus efficace.
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Références :
- Rosenthal R. & Jacobson LF., « Teacher Expectation for the Disadvantaged », Scientific American, vol. 218, no 4, 1968, p. 19-23.
- Rosenthal, R., & Rosnow, R (1984). Essentials of behavior research. New York : McGraw-Hill.